L'enclave espagnole de Melilla (l'Europe sur une terre africaine) est située au Nord du Maroc. Sur la montagne qui la surplombe vit environ un millier de migrants africains, surveillant la frontière, un système de clôture séparant le Maroc de l'Espagne. Abou, originaire du Mali est l'un d'eux - le protagoniste devant la caméra ainsi que la personne qui filme. Sur une période de plus d'un an, il a sans cesse persisté à sauter la clôture. A clôture, ils doivent affronter les barbelés, le gaz automatique au poivre et des autorités brutales. Après chaque tentative ratée, ils retournent au Mount Gurugú, cherchant de la nourriture dans les villages environnants, essayant de mettre une sorte d'ordre dans le camp et regagner confiance en eux encore. certains abandonnent et et rentrent chez eux, d'autres ne reviennent jamais vivants de la clôture. En regardant à travers l'objectif, Abou trouve peu à peu l'expression et le sens de sa situation. "Quand je film, je sens que j'existe". Mais après 16 mois sur la montagne, Abou est proche d'un tragique accident à la clôture. Retourner au Mali n'est pas une option pour lui, et il devient plus déterminé que jamais à poursuivre son rêve d'une vie meilleure en Europe. LES SAUTEURS, en fin de compte un film sur la réalisation de film, est un portrait d'Abou sur le combat pour la dignité et la liberté, sur l'une des frontières les plus militarisées au monde.
Un film de Moritz Siebert, Estephan Wagner, Abou Bakar Sidibé
Danemark, 2016, Documentaire, 1h20, langues: Français / Bambara, sous-titrées
ENTRETIEN AVEC LES REALISATEURS
Les Sauteurs est une expérience documentaire - le protagoniste devient le documentariste. Comment cette collaboration est-elle venue ? Où et comment vous êtes-vous rencontrés ?
Moritz Siebert, Estephan Wagner : Le terme "expérience" illustre très bien le processus. Au cours de nos recherches pour le projet, nous voulions trouver une approche qui, si tout se déroulait bien, allait ajouter une nouvelle qualité aux travaux déjà existants sur le thème. Nous sommes entrés en contact avec Abou Bakar Sidibé et d'autres réfugiés grâce à un photographe de Melilla, qui avait travaillé pendant des années sur le sujet. Au début, nous avions donné une caméra à Abou et à son ami Baba en leur expliquant les bases du tournage. Puis ils ont commencé à filmer. Quand nous avons découvert les premières images, Il s'est avéré qu'Abou avait filmé beaucoup plus que ce que nous espérions. Nous sentions qu'il s'amusait à manier la caméra. Ceci s'est intensifié avec notre collaboration. Au début, nous avions des idées précises sur ce qu'Abou pouvait filmer. Cependant, pendant le tournage, beaucoup d'entre elles s'avéraient irréalisables. En fin de compte, ce qui était le plus intéressant et que nous n'aurions jamais pensé à faire, étaient les choses qu'Abou avait filmées, comme par exemple les scènes du petit âne et son utilisation de la musique.
Moritz et Estephan, la décision de passer la caméra aux protagonistes est particulière. Abou, quelle a été votre motivation pour accepter ce matériel ?
Abou Bakar Sidibé : Tout au long du projet ma motivation a changé. Au début, le fait de recevoir de l'argent était l'aspect le plus important. Cela signifiait que je pouvais acheter de la nourriture pour mes amis et moi-même et que je n'avais plus à mendier ou à chercher de la nourriture dans les poubelles. En même temps, c'était très important pour moi que la montagne et tout ce qui s'y passait soient documentés, afin que notre histoire, mon histoire, ne soit pas oubliée un jour. J'avais besoin de montrer que nous étions en vie, que nous étions des êtres humains et non des fantômes.
Moritz Siebert, Estephan Wagner : Abou avait filmé pendant presque trois mois avant, et après seize mois sur la montagne de Gurugu, il a finalement réussi à sauter la barrière. Nous nous rendions à Melilla toutes les quatre semaines pour rencontrer Abou sur la montagne. Les vidéos avaient été faites par Abou lui-même et en partie par ses amis. Ensemble, nous faisions des exercices mineurs de tournage : nous parlions des différentes façons de résoudre des scènes.
Comment la caméra a-t-elle été vécu dans le camps ?
Abou Bakar Sidibé : À un moment donné, plus de mille personnes vivaient dans le camp, et bien sûr je ne les connaissais pas toutes. Tous ne voulaient pas être filmés. J'ai donc filmé seulement les gens dont j'étais proche et qui me faisaient confiance. Au début, je voulais capturer notre vie là-bas sur la montagne. Pendant le tournage, j'ai découvert de plus en plus de détails qui m'avaient échappé jusqu'ici. Soudain, j'ai perçu différents moments, y compris de beaux moments - par exemple, comment la lune scintille la nuit sur la mer calme. Cela faisait aussi partie de notre vie, dans cette misère, et c'était important pour moi. À un certain moment, j'ai commencé à mettre de la musique directement sur les images à partir de mon téléphone. De cette façon, je voulais exprimer des sentiments et montrer que nous étions en vie. Ces images qui existent maintenant préservent ces moments pour l'avenir. En même temps, filmer est devenu pour moi un devoir, une mission significative pendant la longue attente sur la montagne.
Dans quelle mesure avez-vous travaillé ensemble pendant le processus d'édition ? Comment le texte de la voix-off s'est-il développé ?
Moritz Siebert, Estephan Wagner Estephan a monté le film à Copenhague, et Moritz a pu y prendre part en utilisant une copie de montage sur son ordinateur à Berlin. A ce moment-là, Abou vivait en Espagne, puis plus tard dans différents logements dans le sud de l'Allemagne en tant que demandeur d'asile. Cela a ralenti temporairement notre collaboration. Notre collaboration la plus intensive fut sur la voix off. Abou a commencé à écrire son histoire lorsqu'il est arrivé en Allemagne. Ensemble, nous avons développé des idées pour la voix off à partir des entrevues audio que nous avions menées pendant et après le tournage. Nous mélangions souvent ces texte à des passages filmés pour ensuite les envoyer à Abou, qui à son tour faisait des changements et des ajouts. En octobre 2015, nous avons tourné en une journée la voix off préliminaire à l'aide d'une caméra vidéo. Toutes les fois où nous voulions faire un changement ou une modification, nous en discutions avec Abou pour trouver un accord. Il parlait ensuite directement sur son téléphone et envoyait le fichier audio à Moritz, à Berlin. Moritz faisait une présélection et l'envoyait à son tour à Estephan à Copenhague, où l'intégrait au montage.
Réalisateurs : Mortiz Siebert, Estephan Wagner
Coréalisateur : Abou Bakar Sidibé
Caméra Abou Bakar Sidibé
Monteur Estephan Wagner
Montage Son et Mixage Henrik Garnov
Coloriste Maria Klarklund
Post-Production Kong Gulerod
Film Conception Graphique Niels Christian Konrad Nielsen
Production Final Cut for Real Signe Byrge Sørensen, Heidi Elise Christensen www.final-cut.dk/films2.php?mit_indhold_id=3&films_id=26
Produit avec le support de Danida, Danish Film Institute, Film Workshop, BMU Fondation Produit avec la collaboration de Mette Hoffman Meyer
Distribution : Widehouse Distribution
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